Des Noix, des Noisettes et… une Chouette !

24 mai 2018 :

Des Noix, des Noisettes et… une Chouette !

Ou quelques jours passés dans un chouette nid de la Bouriane… !

Il n’aura fallu que quelques secondes pour tomber sous le charme – merci l’internet - d’un bout de bois au milieu duquel une chouette a fait son nid. Quelques clics, quelques démarches suffisent pour la réservation et la durée du séjour, un échange plus que sympathique - merci le téléphone - avec Dominique, l’ami de la chouette, auquel elle confie les clés de son domaine. Quelques heures de route pour parvenir à bon… nid, le dernier kilomètre relevant du jeu de piste. Car Dominique, Cathy sa compagne et leur chouette s’entendent à ce que leur lieu de vie et d’accueil soit préservé de toute présence humaine intempestive et irrespectueuse : le « Nid de la Chouette » ne figure sur aucune carte et n’apparaît pas non plus sur les pancartes de signalisation depuis la commune de Salviac (département du Lot, territoire de la Bouriane, frontalière du département de la Dordogne) dont il dépend pourtant.

Y atterrir est un exploit. Y nicher, c’est donc le mériter. Y habiter, c’est faire cœur et corps avec la nature en engageant un dialogue quotidien avec les chênes protecteurs de cette mignonne maisonnette de bois... Y résider, c’est se reconnecter avec les valeurs fondamentales de l’existence : la relation à l’autre. Y rester suffisamment de temps, c’est se donner les moyens de se faire une idée et flasher sur la vie dans la région, pourvoyeuse de richesses infinies.

Au départ de ce nid si chaleureux qu’on aurait tendance à y paresser, au lit ou sur la terrasse, dans un état contemplatif, attentifs au langage des arbres et des oiseaux, les possibilités d’exploration sont infinies et les découvertes sensorielles et épanouissantes à tous les niveaux.

La chouette niche dans un lieu idéal pour qui a envie de se dégourdir les jambes et de frayer avec le chevreuil qui gambade au loin, les lapins qui sortent de leurs terriers sous la rosée du matin, les chèvres et les brebis. Pour les marcheurs, ils peuvent emprunter les tronçons les plus proches du GR652, l’un des sentiers parmi les moins fréquentés menant à Saint-Jacques-de-Compostelle. Pour les cyclistes, les pistes alentours permettent de parcourir de plus longues distances, a fortiori en empruntant à un Dominique prévoyant un VTT ou un VTC à assistance électrique. Quel que soit le mode de cheminement souhaité, se balader en partant de la route de Boulegan, c’est tout bêtement, entre deux gariottes, ces cabanes de pierres sèches sous lesquelles les bergers s’abritaient, partir à la rencontre de la vie et des animations locales. Tout y est chaleureux. A Salviac, l’Auberge du Quercy est un havre de bonhomie, sa brocante un joyeux capharnaüm et son champ de panneaux solaires complètement… inimaginable pour qui ne l’a pas débusqué au détour du chemin. A Gourdon, dont le centre-ville, médiéval et refermé sur lui-même, est pourtant bien silencieux en ce jour férié du 8 mai, on trouve des Pipelettes qui se sont décidées à laisser leur coin ouvert aux quatre vents. A Cazals, le marché du dimanche est l’occasion pour les producteurs locaux et la clientèle, très anglophone, néerlandaise et belge, de se retrouver. A Gommiers, le boulanger poursuit sa livraison de pain et l’atelier du relieur est sur le point d’ouvrir. Au Pech-Curet, le four à pain traditionnel est fermé mais paraît-il qu’il est utilisé une fois par an pour créer un lien entre les rares habitants du hameau.

Depuis le nid de la chouette, il est également si facile de rallier, en véhicule, par des routes adorables, des sites certes touristiques et peu propices au calme mais vraiment incontournables pour la culture et l’histoire. Cahors au sud ; dans le département voisin de la Dordogne, Rocamadour la hautaine et Sarlat la fière (en dépit du froid, de la grêle, de la pluie et du vent). La beauté minérale et sèche du Parc naturel du Quercy, qu’il faut traverser par une route départementale aussi charmante qu’elle n’est dangereuse, provoque une vibration intérieure : la reconnexion à la nature est immédiate.

Dans ces terroirs où la gastronomie est un maître-mot – l’oie, le canard, la volaille sont à la base des plus réputés des confits, terrines et foies gras, les vins de Cahors étant également célébrés par les œnologues amateurs et experts, la noix et la noisette du Quercy –ou du Périgord selon les appellations et usages – forment la signature sucrée de la région. Huiles, gâteaux, biscuits, confitures, etc. on ne compte pas les recettes gourmandes proposées aux papilles. Les apiculteurs locaux en tirent profit par la création de miels raffinés et goûteux, qu’il est même possible, pour certains, de trouver référencés dans la grande distribution. Cela manque peut-être un peu de poésie mais si cela peut aider les producteurs à se faire connaître, pourquoi pas ? Ainsi en va-t-il, par exemple, des crèmes de noix et de noisette signées « La Douce Abeille », conçues par un couple d’apiculteurs, les Chapel, dans un lieu-dit dépendant de Gourdon. Autre exemple, les produits estampillés « L’Artisan Gourmet » qui, après vérification, sont fabriqués pour la grande distribution par l’usine locale « Noix Délice », la marque disposant de distributeurs et de sa propre boutique sur Sarlat. Quel plaisir de rencontrer ainsi l’artisan fondateur, M. Carretier… père ! Il ne lésine pas sur les explications fournies quant à ses fournisseurs de matières premières, ses approvisionnements, ses recettes et leurs cuissons, sur la taille encore humaine de sa petite fabrique. Il répond à toutes les questions et n’est pas long non plus à offrir trois petits pots dont il a le secret : le Noimiel, la Confiture de Noix et la Pâte à tartiner noisettes praliné. A Rocamadour, un autre hasard fera le bonheur du gourmand : l’ouverture récente d’une épicerie fine, « Tendance & Terroir », également spécialiste des produits à base de noix et de noisettes locales. Dominique Capperoi, très généreux, dépose à son tour dans une malle aux trésors déjà bien garnies sa confiture de noix et sa confiture de noisettes.

Trois déceptions durant ce séjour alliant les balades dans la nature, les balades culturelles et les pauses sucrées :

- La porte est close à « La Grange aux Truffes » : l’artisan-chocolatier installé dans une bâtisse traditionnelle et charmante, du non moins charmant village de Padirac, est en congé ; sa pâte à tartiner n’est donc pas accessible ;

- La sieste est bien méritée à Prayssac chez « Zacao » : la chocolatière Isabelle Zliechovec, en reconversion professionnelle, fabrique à domicile, dans la maison qu’elle partage avec son compagnon brocanteur – pour les chineurs, il y a de quoi se réjouir de l’endroit - des produits (tablette et pâte à tartiner) labélisés en bio et en commerce équitable (Nature & Progrès), qu’elle vend ensuite sur les marchés avec sa petite camionnette toute violette ;

- et si, de son côté, le chocolatier-artisan Patrick Dhaisne s’active dans son laboratoire à Cahors, d’agréables odeurs émoustillant les sens dans la boutique, ses exigences en termes de qualité et son adaptation aux désirs de la clientèle font que sa pâte à tartiner n’est pas de saison sera disponible qu’à partir de l’automne.

Heureusement, les déceptions sont vite compensées par cette trouvaille magique et exclusive, celle d’une pâte à tartiner aux noisettes du Quercy, dénichée par inadvertance sur le marché de Cazals. Elle est le fruit du travail familial et local d’une famille de producteurs implantée à Campagnac-du-Quercy, qui vit des ventes de produits en nombre limité sur deux marchés du secteur. De quoi redonner le sourire à tous les gourmands un peu chagrinés par ces quelques jours de congés qui s’achèvent.

Oui, il est malheureusement temps de te quitter, la chouette, et de céder ton nid douillet à de prochains occupants, qui seront à leur tour, c’est certain, séduits, conquis.

Ce séjour dans ce petit coin du Lot, à la croisée du Lot-et-Garonne et de la Dordogne, aura été pourvoyeurs de nombreux souvenirs, des images plein les mirettes, des odeurs plein le nez, des sensations au cœur et au corps. Surtout, grâce à toi, à la chouette, l’occasion d’une rencontre coup de cœur avec ceux qui savent si bien faire partager leur habitat et leur conception de la vie. Un Dominique proche de la nature, débordant de générosité sous des côtés faussement bourrus, et sa Cathy, fine pâtissière – sa tarte aux poires et au chocolat, quel délice ! – Avec eux, point de tabou, point de chichi, tout est naturel et simple. Tout est partage et convivialité. Et lorsqu’en plus, on est invité dans leur chalet pour une dégustation d’un thé cacao dont la décoction est créée et dosée par une amie herboriste du couple… La cerise sur le gâteau. Ou plutôt, restons couleur terroir, la noix sur le gâteau !

La vie parisienne reprend, difficilement, son cours. Mais la malle aux trésors est posée là, pas loin. Il suffira de l’ouvrir. Il suffira d’y puiser noix, noisettes et autres spécialités régionales pour retrouver le chemin du sourire et s’offrir une suspension de temps. Puis décider, un jour, qu’il est temps de retourner sur la route de Boulegan, car il reste tellement de choses à découvrir alentours. Tu ne ululeras sans doute jamais le contraire, hein la chouette ?

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