Compte rendu exhaustif de l'émission :

La société MONBANA, créée en 1934 à Garenne-Colombes et aujourd’hui toujours gérée par une seule et même famille, la famille GATTARI, c’est 300 collaborateurs, plus de 350 références, une trentaine de boutiques, deux usines dans les départements de l’ouest français et une usine en Alsace. La moitié de sa production est à destination professionnelle. Son produit-phare, pour les particuliers, reste le Napolitain, le petit chocolat servi au moment du café en particulier. Yves GATTARI, PDG de la société, troisième génération de la famille, est aujourd’hui confronté à la nécessité d’accroître le développement de la société tout en rencontrant de nombreux obstacles pour obtenir des soutiens bancaires.

Vivre heureux dans une entreprise industrielle est une étape clé et fondamentale pour conforter la société dans ce qu’elle a de pérenne et rassurer les soutiens extérieurs pour son avenir. Alors, que va-t-il découvrir en tant que « patron incognito » ?

Se découvrir soi-même, en premier lieu et avant toute chose. S’apprêter à endosser le rôle d’un ouvrier d’une chocolaterie belge, Jean-Philippe WILKENS, bénéficiant d’un programme d’échange, il se voit totalement relooké et grimé : une barbe, une teinture blonde pour ses cheveux, des lunettes et une boucle d’oreille. Il a un peu de mal mais bon…

Sa première formation est organisée à Colmar, dans l’usine de production et de conditionnement que la société a racheté il y a trois ans alors qu’elle était en procédure de liquidation judiciaire, qui emploie une quarantaine de salariés pour une production totalement artisanale, sur une surface de production de 5000 mètres carrés. Dans cette usine qui a failli fermer, les salariés, soulagés du rachat et de la continuité de l’activité, craignent néanmoins encore d’être menacés de licenciement.

Jean-Philippe WILKENS est pris en charge dès son arrivée sur site par Nathalie, une conductrice de ligne en poste dans l’une depuis 2005. Elle confie à son protégé d’une journée sa satisfaction des conditions de travail et sa sérénité mais précise avoir certaines inquiétudes néanmoins quant à l’avenir. Elle montre en quelques gestes efficaces les tâches qui lui sont imparties : « coller joliment les étiquettes » à la main, les sachets étant de trop petite taille pour souffrir la machine. Bien sûr, ce collage doit être rythmé puisqu’il ne faut pas interrompre la cadence de la chaîne. Jean-Philippe s’y met : fermer le sachet, l’entourer d’un nœud serré manuellement, mettre un point de colle, poser le sachet dans un carton, lequel, lorsqu’il sera rempli, filera directement en entrepôt pour être ensuite transporté vers une grande surface. Le moins qu’on puisse et qu’il puisse, c’est qu’il a du mal à tenir le rythme ! La panique monte après une heure de travail, la chaîne prend du retard au bout d’une heure trente. Le rendement exigé étant de 200 boîtes par heure. Après deux heures, la direction de l’usine est informée du retard pris par la ligne : 240 sachets manquent à l’appel des cartons. Le responsable de la chaîne doit intervenir. Nathalie parviendra à résorber le retard. Car, comme tous le disent, « le camion n’attend pas ». Durant la pause-déjeuner, Jean-Philippe la suit au réfectoire et rencontre Rachel, une responsable de l’usine. En confiance, toutes deux lui font part de leur vie commune ensemble, depuis dix ans et sur les craintes qui étaient les leurs vis-à-vis des autres ouvriers et employés, pouvant penser à du favoritisme. Jean-Philippe est ému par « cette sincérité, cette valeur » que dégagent les deux femmes. Son bilan est positif : il a pris conscience que les ouvriers partagent des moments difficiles, mais qu’à l’image de Nathalie, la bonne humeur est indéfectible et que la conscience professionnelle est « carrée ».

Le lendemain, il change de poste et est accueilli dans la partie production de l’usine, par Angélique, conductrice de ligne depuis trois ans, mère d’un petit garçon de cinq ans et demi. Dès les premières minutes, elle insiste sur son attachement très rigoureux à l’hygiène. Elle explique la teneur de son quotidien – la fabrication et la décoration à la main », une tradition perpétrée sur ce site depuis 40 ans - à Jean-Philippe : « mettre des amandes sur le chocolat à un rythme rapide ». Pour celui-ci, la présentation est trop rapide et pas assez explicite ; il constate en particulier que chacune des ouvrières employée sur la ligne utilise sa propre technique et qu’Angélique ne fait pas montre d’une vision globale de la chaîne. Du coup, aucun rythme n’est vraiment respecté, ce qu’Angélique et ses camarades justifient par un manque évident de personnel sur le poste. Angélique ajoute, par ailleurs, qu’elle perçoit un salaire identique à celui des femmes qu’elle contrôle. Pour Jean-Philippe, qui a du mal avec la décoration manuelle, Angélique est spontanée, fière, responsable et légitime à ses fonctions.

C’est donc un bilan positif pour l’usine : il pense ne pas avoir à regretter d’avoir sauvé cette usine compte du savoir-faire, des acquis et de la solidarité entre employés. Il insiste, en voix off, sur le fait qu’une entreprise dépend autant de ses dirigeants que des salariés, qui sont les seuls à pouvoir produire.

Pour sa troisième formation, Jean-Philippe part à Bretigny-sur-Orge, dans l’une des très récentes boutiques franchisées ouvertes par la société MONBANA. Par stratégie, il a opté pour une visite un samedi, le jour de plus forte affluence clientèle, ce d’autant plus pour une période charnière entre Noël et Pâques. La boutique propose 250 références et, règlement de base de toute boutique, une hôtesse se doit de connaître tous les produits et l’histoire de la société sur le bout des doigts. Son arrivée passe plutôt… incognito, c’est le moins qu’on puisse dire. Elodie, qui n’est employée en boutique que depuis à peine un mois, n’a pas fait le rapport entre cet individu qu’elle considère comme un client, et Jean-Philippe, ouvrier belge, dont elle a été prévenue du stage d’échange. Il est du coup dans l’obligation de se présenter. Elodie lui apprend alors qu’elle a 19 ans et qu’elle est titulaire d’un CAP de boulangerie. Jean-Philippe fait le tour de la boutique en laissant Elodie s’occuper des clients présents. Il constate avec effroi et contrarié de nombreuses irrégularités : des ballotins à moitié remplis, des chocolats blanchis, ce qui n’altère en rien le goût des produits mais ce qui n’est pas présentable. Il se rend compte ensuite que l’hôtesse n’a qu’une connaissance très approximative de la gamme des produits qu’elle est censée promouvoir et vendre, pour assurer la fidélisation du client. Il pense tout de suite : « gros déficit de formation ». Par certains petits détails, tout en demeurant neutre, il lui fait prendre conscience de ses lacunes, en particulier sur l’histoire de la société et de ses produits phares. Discrètement et dès qu’elle le peut, Elodie s’isole pour potasser ses connaissances en matière de napolitains. Elle ne fait néanmoins toujours pas de rapprochement entre son visiteur « incognito » et la photo du patron qui trône dans la boutique. Par la suite, Jean-Philippe observe une organisation sans structure de la boutique : des cartons non triés, ce qui l’agace, faute de temps. Des étiquettes sans références, ce qui attise la confusion chez un client qui ignore le nom et les ingrédients du produit qu’on lui présente. Pour lui, la législation n’est pas respectée.

Durant la pause-déjeuner, il profite de son court moment avec Elodie pour lui suggérer d’effectuer une formation de chocolatière. En retour, la jeune femme, avec spontanéité et sincérité, parle de son enthousiasme de travailler pour la société MONBANA et ne se plaint pas de son salaire : 85% du SMIC, soit l’équivalent de 700 euros. Ce qui surprend Jean-Philippe.

Dans l’après-midi, et quoiqu’on soit un samedi dans une période propice à cause des fêtes, peu de clientèle. Il réfléchit alors à la manière d’attirer le chaland : améliorer la signalétique, distribuer des prospectus, faire connaître le magasin, ouvert très récemment. Il déniche dans la réserve des stickers et des affiches qui traînent dans les couloirs sans être utilisés, ce qui là encore l’énerve. Pour lui, Mélodie a trop de responsabilités alors qu’elle n’a pas les compétences suffisantes. Son bilan est mitigé.

Pour son quatrième jour d’échange, Jean-Philippe se rend en Ille-et-Vilaine pour suivre le quotidien d’un technicien polyvalent, dans une usine à chocolat en poudre flambant neuve, inaugurée par… lui-même, deux mois auparavant. 5500 mètres carrés de surface, 40 salariés, une usine encore en phase de rodage, sous la coupe de règles d’hygiène ultra strictes, car indispensables. Son camarade s’appelle Dimitri. Un jeune homme timide et stressé, qui ne cesse de courir partout. Et pour cause. Il s’occupe de 12 lignes sur le conditionnement de poudres, confectionnées à partir de différents mélanges. Il est le plus jeune employé du site. 22 ans. Auparavant, il travaillait dans l’ancienne usine, plus petite, devenue obsolète. Jean-Philippe commence par tester le technicien sur l’hygiène. Dimitri n’a pas l’air de s’apercevoir qu’il porte une montre au poignet et une boucle d’oreille. En revanche, il est intransigeant pour qu’on se laver les mains. Ses fonctions au quotidien : approvisionner en poudre les lignes destinées au conditionnement. On ne peut pas dire que cela soit du tout cuit. Jean-Philippe tombe des nues : l’une des chaînes fuit de manière importante au rez-de-chaussée, ce qui l’agace énormément. Il comprend que cette fuite est liée non à la machine, neuve et bien réglée, mais au système de sécurité, qui a été conçu ad minima faute d’investissements bancaires. Pour lui, impossible de demeurer à son rôle d’ouvrier observateur : il regarde Dimitri perdre du temps à aspirer la poudre qui fuit et passer son temps à nettoyer. Lors de la pause-déjeuner, fixé à 30 minutes, il apprend que Dimitri est titulaire d’un Bac Pro en mécanique et qu’il a été longtemps intérimaire. Il lui suggère des formations pour évoluer dans ses fonctions. En retour et dans l’après-midi, Jean-Philippe est dans le feu du sujet : Dimitri est contraint d’arpenter sans cesse les 5500 mètres carrés de l’usine pour assurer la manutention des containers sans freiner et stopper les machines. Il est obligé de courir, les containers étant en nombre à flux tendus, toujours pour des raisons budgétaires. Du coup, à force de courir, il en oublie des règles de base en matière de sécurité et d’hygiène. Constat : « aucune économie de temps » n’a été prévue dans cette unité. Le bilan est mitigé : Dimitri s’implique énormément dans son travail mais témoigne d’une certaine passivité face aux problèmes rencontrés et ne fait pas preuve d’initiative. Sachant néanmoins qu’étant homme de ménage, il n’ose sans doute pas se le permettre.

Fin du stage de Jean-Philippe WILKENS, ouvrier belge. Retour au siège de la société MONBANA, à Aubervilliers, où il doit organiser en tant qu’Yves GATTARI un debriefing sur l’échange franco-belge organisé. Angélique, conviée, n’est pas disponible à la date prévue. Se présentent Nathalie, Mélodie et Dimitri. Qui ne se doutent pas qu’ils vont être reçus dans le bureau du PDG lui-même.

Leurs réactions :

- Nathalie : « excellent, j’adore ».

Yves Gattari souligne sa conscience professionnelle, le temps qu’il lui a fait perdre mais le sourire qu’elle a toujours eu pour rattraper le retard. Il vante sa proximité, sa sincérité, sa franchise. Nathalie, émue, précise qu’avec sa compagne elles souhaitent « être là jusqu’à la retraite » et en voix off, indique « qu’il s’est mis à notre place ».

- Dimitri : « je ne peux pas faire autrement que le vouvoiement »

Yves Gattari énumère les points qui l’ont choqué lors de son passage dans son usine, et en particulier la fuite de poudre de cacao. Il précise à Dimitri qu’il ne faut pas hésiter à faire remonter l’info à la hiérarchie et qu’il ne faut rien lâcher. Il parle également des retards dans la rotation des containers, retards qui ne sont pas de son fait mais du nombre trop restreints de containers. Pour encourager Dimitri à persévérer et à se sentir encore mieux dans son activité, il lui propose de sponsoriser sa passion pour la moto !

- Mélodie : elle n’en revient pas.

Yves GATTARI liste les manquements à son devoir d’hôtesse : fabrication des corbeilles, poissons en chocolat cassés, les étiquettes absentes ou partielles en matière d’ingrédients notamment. Il insiste sur ses lacunes quant à l’histoire de la marque MONBANA et lui remémore les qualités primordiales d’une vendeuse ; le contact, la spontanéité et la maîtrise des produits. Pour valoriser son enthousiasme, il lui offre de financer son permis de conduire.

Pour Angélique, qu’il retrouve ultérieurement à Colmar, il fait état de la perte de productivité de sa ligne de 10 % à 15 % du chiffre demandé, manquement lié à l’absence d’organisation structurée et cadrée de la ligne. Tout en la félicitant pour le fait d’être, à son âge (26 ans), conductrice. Pour la récompenser, conscient d’un salaire identique à celui de ses camarades sans responsabilités, il lui offre un week-end complet dans un parc d’attraction avec son compagnon et leur enfant.

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